Témoignage de Marion, Maman d’Elena née à 33 SA +1
Le début de mon allaitement
Mon allaitement a commencé 45 heures après la naissance de ma fille, avant ça, j’étais en salle de réveil (j’ai accouché par césarienne d’urgence pour prééclampsie). Quand je suis enfin revenue dans ma chambre, la sage-femme m’a demandé si je voulais allaiter. J’ai répondu que oui, heureuse de savoir que c’était encore possible. Un tire-lait m’a été apporté et la marche à suivre rapidement expliquée : commencer par 10 minutes par sein puis 15-20 minutes toutes les 3 heures. Bonne élève, je me soumets à l’exercice…et en 20 minutes j’obtiens 3 ou 4 ml d’un liquide orange…
Franchement déçue, j’emporte le flacon en néonat et le tend à l’infirmière qui s’occupe de ma fille en lui disant « Je suis désolée, il n’y a que ça…».
Et là, cette femme m’a répondu avec une telle spontanéité qu’elle ne pouvait être que sincère « Mais vous plaisantez ? C’est un trésor ça ! Je vais lui donner tout de suite ». Avec ces mots, elle m’a sauvée, sortie de mon brouillard post-choc. Moi, mère coupable et meurtrie, moi, j’étais capable d’apporter un trésor à ma fille !
J’ai donc pris cette mission très à cœur. Le fait de pouvoir allaiter ma fille m’a remis à ma place de maman. Il n’y avait que moi qui pouvait le faire, moi et personne d’autre ! J’ai été privée d’une fin de grossesse classique avec un ventre énorme et un accouchement voie basse. Ma fille m’a été arrachée. Mais personne ne pouvait me remplacer pour l’allaitement !
L’expérience du peau-à-peau
Presque 1 an après la naissance de ma fille, j’ai reçu un message photo de ma cousine : on la voyait avec son bébé sur le ventre en salle de naissance… Je suis restée scotchée à la photo, sans pouvoir m’en détacher et puis j’ai fondu en larmes en me disant « Moi je n’ai pas cette photo là et je ne l’aurais jamais ». Puis, en y réfléchissant bien, je me suis dit « Mais si tu l’as cette photo ! » …sauf qu’elle a été prise 66 heures après la naissance dans le service de néonat lors de notre premier peau-à-peau mère-fille.
Mon premier peau à peau avec bébé
Ce fameux premier peau-à-peau, ce moment tellement attendu, tellement idéalisé et tellement redouté aussi. « C’est bon pour le bébé », « ça l’aide à réguler sa température », « c’est important » sont les phrases que j’ai entendues à propos du peau-à-peau. Alors comment dire que l’on ne se sent pas très à l’aise, que l’on a peur ? Pour qui passerions-nous en tant que mère ?
Le moment fatidique est arrivé, j’ai été installée dans un fauteuil en me demandant de me mettre à l’aise, et j’ai vu et senti mon trésor se poser sur moi… Un instant magique…
Puis une question m’a ramenée à la réalité : « Ça va madame ? Vous êtes bien ? On est parti pour 3 heures ? ». Dans ma tête : des réflexions en pagaille fusent : « Est-ce que ça va ? euh…comment dire ? j’ai le ventre qui tire, les jambes complètement crispées de peur de glisser, j’ai super chaud (j’aurais dû mettre un débardeur !), je ne voudrais pas faire tomber mon amour de bébé ». Mais je me suis entendu répondre : « oui ! super ! merci ! »
Et quand l’infirmière est partie, je me suis dit « 3 heures !! au secours ! ». Cependant, j’ai pris sur moi et j’ai tenu et puis avec monsieur qui est resté assis à côté à nous regarder avec amour et envie, je n’ai pas pu m’avouer faible…oh non !
Le premier peau-à-peau n’a pas été juste du bonheur pour moi, je l’ai vécu comme un examen, en tout cas, je me suis mis la pression. « Suis-je une bonne maman si je ne suis pas capable de tenir le temps d’un peau-à-peau ? », « Est-ce que c’est grave de ne pas trouver cela hyper agréable ? » sont des questions que je me suis posées sans oser en parler.
Un manque d’information sur les bienfaits du peau-à-peau
Le premier peau-à-peau passé, les suivants ont été beaucoup plus bénéfiques pour moi, car une fois l’appréhension passée, la bonne position trouvée et la tenue adaptée prévue : j’ai pris confiance. Et à chaque fois, c’étaient de vrais moments de partage et de bien-être.
Le seul regret que j’ai aujourd’hui, c’est de ne pas avoir été assez informée sur les bienfaits du peau-à-peau dans sa globalité. C’est-à-dire qu’une fois que ma fille a su réguler sa température et qu’elle a pu passer en lit et donc en pyjama, nous n’avons plus fait de « peau-à-peau » proprement dit.
Nous avons fait des câlins, ça oui ! Elle était quasiment en permanence dans nos bras, mais sans le bénéfice du peau-à-peau. Et je trouve cela dommage.
Le seul commentaire qui aurait pu me mettre la puce à l’oreille, c’est celui de la psychomotricienne du service qui m’a dit une fois en passant : « vous savez, ce n’est pas parce qu’elle est habillée que vous n’avez pas le droit de la déshabiller ». Sauf que moi, j’y ai vu des contraintes pour ma fille : la déshabiller c’était pour moi l’embêter et risquer de lui faire prendre froid.
Aujourd’hui, je me rends compte que cela aurait été des petits désagréments passagers pour des bénéfices immenses.